Soldats nord-coréens en Ukraine: des enregistrements audio interceptés montrent leur intégration chaotique
Pas d'interprètes, pas de munitions: de quoi interloquer les troupes russes censées combattre à leurs côtés.
C'est confirmé, des soldats nord-coréens sont arrivés en Ukraine pour grossir les rangs d'une armée russe qui en a bien besoin, tant elle ne compte pas quand il s'agit d'envoyer les siens au casse-pipe. Des enregistrements interceptés par la direction générale du renseignement du ministère de la Défense ukrainien (HUR MOU) et partagés vendredi 25 octobre nous en apprennent un peu plus sur leur difficile intégration avec les troupes de Vladimir Poutine, rapporte le média en ligne américain Business Insider. D'après le service de renseignement ukrainien, il s'agirait d'une discussion entre des militaires russes, membres d'un bataillon situé dans l'oblast de Koursk (ouest de la Russie).
On y entend des soldats partager, dans un langage fleuri, leurs doutes et leurs questionnements sur la manière de gérer ces nouvelles recrues. Les voix évoquent l'arrivée des troupes de l'armée de Kim Jong-un, surnommées «bataillon K», même si certains les appellent… «les Chinois», de quoi poser des bases saines pour leur future collaboration. L'enregistrement n'a pas pu être authentifié de manière indépendante par Business Insider.
Selon les informations du renseignement ukrainien, ces soldats appartiendraient à la 810e brigade d'infanterie de marine russe, mobilisée notamment dans la région de Koursk pour contrer l'incursion surprise de l'armée ukrainienne en août 2024. Principal problème? Le manque de consignes claires de la part de leurs supérieurs concernant l'intégration et les missions à confier aux nouveaux arrivants. «Il n'a pas la moindre foutue idée de ce qu'il faut faire avec eux», assure une voix en évoquant un de ses officiers.
Plus loin dans l'enregistrement, une autre voix se plaint de problèmes d'organisation: qui va nourrir les troupes nord-coréennes? Qui leur fournira des munitions? «Qu'est-ce qu'on en sait, pu****, lance un homme. On a bien reçu les rations pour tout le monde, mais ils ne veulent pas nous donner de munitions.» Il ajoute également que la barrière de la langue n'arrange rien. Un interprète pour trente soldats, c'est trop peu: «Il y a un truc que je ne comprends pas… On a besoin de trois chefs pour chaque groupe de trente. Où est-ce qu'on est censé les trouver, bor***?»
Comment dit-on «bonjour» en coréen?
La coopération militaire directe et humaine entre les deux pays est une nouveauté et il était évident que des couacs de ce genre auraient lieu, tout du moins au début. Les troupes russes ne brillent déjà pas par leur organisation et leur expérience depuis le début de l'invasion de l'Ukraine à la fin du mois de février 2022. Et incorporer des régiments étrangers n'est pas une mince affaire.
L'arrivée des renforts envoyés par Pyongyang dans la région de Koursk a été confirmée lundi 28 octobre par Mark Rutte, le secrétaire général de l'OTAN, vérifiant ainsi les informations fournies par les services de renseignement sud-coréens. Ces derniers affirmaient depuis plusieurs semaines que la Corée du Nord se préparait à envoyer plusieurs milliers de soldats en Russie, où ils seraient entraînés avant de rejoindre le front en Ukraine.
Ce partenariat devrait à terme bénéficier au Kremlin en renforçant ses capacités de combat, même si les experts en culture militaire nord-coréenne et en défense estiment qu'il sera difficile de coordonner efficacement deux armées très différentes. «Conduire des opérations de combat avec une force alliée qui ne parle pas votre langue pose de réels problèmes», indique Joseph S. Bermudez Jr., analyste spécialisé sur les questions de défense et de renseignement nord-coréens, au sein du groupe de réflexion américain Center for Strategic and International Studies.
Cet expert souligne également qu'il ne faut pas balayer le racisme important au sein de l'armée russe, qui pourrait freiner encore plus l'intégration des hommes nord-coréens dans leurs rangs. «Il est plutôt surprenant que la Russie veuille de telles troupes au combat, compte tenu des probables défis logistiques que l'intégration de ces soldats dans les opérations de combat russes entraînera», conclut Joseph S. Bermudez Jr.
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